Hier, discussion autour d’une pizza avec le fils étudiant, le philosophe impliqué dans le mouvement d’une jeunesse qui veut changer la société, profondément, pas se contenter de troquer la tête d’un président contre la tête d’un autre qu’on espère moins néfaste pour les classes populaires. Ça passe par quoi? Remettre du lien, du face à face, du débat, de l’échange, de la fête, et aussi de ce qu’on appelait autrefois éducation populaire. Il ne s’agit pas d’éduquer, bien sûr, mais de partager et diffuser les connaissances. Il s’agit de se réapproprier les savoirs en sortant du brouillard organisée par la propagande libérale et autoritaire jusque dans les programmes de l’Éduc Nat. Nous sommes d’accord que la lutte des classes se joue aussi (avant tout?) là. Se rendre capable de décrire, nommer, problématiser, comprendre ce que chacun·e d’entre nous vit avec les autres. La discussion a commencé après que je lui ai raconté comment une élève de Pantin, dans son application à écrire un poème sur le voyage, égrène la plage, la mer et le shopping en Italie où elle était pour la première fois. En vacances? Non, ça n’est pas ça, elle hésite, cherche comment dire puis raconte l’Italie, une étape dans le grand voyage qui l’a mené du Mali jusqu’ici, l’Italie en attente de ce qui pourra débloquer le chemin d’exil. Je lui demande si cela, elle veut l’écrire dans le poème ou non. Elle dit oui et son visage s’éclaire. La plage et la mer et les copines de hasard avec qui l’on partage quelques gelati, mais ça n’est pas les vacances et ça change tout de pouvoir le dire avec ses mots, en une phrase écrite sur deux vers.
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