J’arrive à la Part-Dieu, lundi, il est neuf heures. Je n’ai rien apporté à lire pour la soirée à l’hôtel. Dans le centre commercial, il y a Decitre, la Fnac. Je me dis que j’y prendrais un poche d’Olivia Rosenthal. Mais non. Je ne trouve rien chez Decitre, seulement, à la Fnac, le dernier grand format. Pas de poches d’Olivia Rosenthal. Mais des piles de polars, de romances, de meilleures ventes. Des murs compacts faits de pavés aux mêmes couvertures, ou qui se ressemblent, moirées, claquantes, dont on ne sait pas bien s’ils ont été produits par une personne, une équipe, un robot. Les tables de la rentrée littéraire d’hiver, chez l’un, des nouveautés, chez l’autre, semblent des radeaux de la méduse perdus dans l’océan des blockbusters. Encore s’agit-il des nouveautés des groupes éditoriaux. On dit que “les gens” ne lisent plus. Pas étonnée du dégoût, et qu’on fuie les assauts du marketing. Heureusement qu’il nous reste quelques occasions de rencontres en face à face où, nous qui écrivons, pouvons parler de nos textes à celleux qui n’ont pas perdu tout espoir dans la lecture. Un lien ténu, d’autant plus précieux qu’on le sent fragile et menacé. Je sors avec, détecté dans un coin, Que peut la littérature quand elle ne peut?, l’essai de Chamoiseau : Quand nous gisons au fond des impuissances, sous ces sidérations que nous partageons tous, au point de croire que nos littératures n’y pourraient rien, c’est peut-être là, exactement, que les arts recherchent les oxygènes naissants, que les littératures s’obligent.
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