J’entraîne une de mes élèves aux épreuves pour le test de connaissance du français niveau A2. Cette femme vit depuis bien longtemps ici, ses enfants sont né.es dans ce pays, iels sont françaisEs. Cette femme, on lui trouve ici un niveau de connaissance du français très suffisant pour effectuer des semaines à rallonge dans les maisons de retraite où elle est aide-soignante. Cette femme, on lui refuse le titre de séjour de dix ans qui la mettrait un peu mieux à l’abri des dérives racistes de nos institutions républicaines, parce qu’elle n’a pas le papier qui prouve son niveau de français, le niveau A2. Alors, elle s’entraîne. Je trouve sur des sites des exemples de test, des épreuves blanches, des exercices de français langue étrangère. Les textes sur lesquels nous travaillons sont ineptes, d’un ennui abyssal, le plus souvent des extraits d’articles de presse qui enchaînent les lieux communs aux platitudes. Il faut connaître ce français là, absolument, pour obtenir la carte de résidente, pour devenir une bonne immigrée et mériter de continuer à s’occuper de nos vieux dans les maisons de retraite, douze personnes et leur chambre dans une matinée. Langue émoussée, désamorcée, vide, avec quoi on ne peut rien formuler d’autre qu’une docile résignation.
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