Nous sommes, plus que jamais, dans l’ère du mensonge et de la mauvaise foi. Plus que jamais parce que les réseaux sociaux ont une puissance de diffusion de la propagande inconnue aux périodes passées. Je lis quelque part, sur un site boueux où la fausse parole se présente, comme toujours à l’extrême droite, sous le masque du bon sens, que le rôle des libraires serait de “promouvoir la lecture sous toutes ses formes”. Il faut que ça lise et peu importe le support, c’est aux lecteurices de faire leur choix dans la foisonnante diversité des titres en librairie. Le client est roi, s’il choisit Bardella c’est qu’il veut lire du Bardella; les libraires refusant de le vendre n’auront que leurs yeux pour pleurer quand iels mettront la clé sous la porte, en définitive le marché serait le garant de la liberté d’expression. Silence sur le système de communication, le battage médiatique, la pression commerciale orientant les consommateurices vers l’achat de tel titre plutôt que mille autres. Non, les libraires indépendantEs ne sont pas des marchandEs de patates, ne sont pas des commerçantEs n’ayant que leur chiffre d’affaire pour seule ligne de mire. Je ne veux pas que mon ou ma libraire de quartier vendent les publications de l’extrême droite au prétexte qu’il en faut pour tous les goûts et que ça paiera salaires et loyer. Diffuser des textes est un acte politique; oublier ceci c’est se nier soi-même, c’est ramasser son argent dans le sang. Mais à nous qui aimons encore les livres d’aider à ce que ces îlots de résistance tiennent bon dans ce moment de corruption des esprits : nous intéresser aux publications dont les médias parlent moins ou pas, montrer de la curiosité pour l’édition indépendante, oser ce qu’on ne connaît pas, s’approvisionner dans les librairies indépendantes qui s’opposent aux diktats du groupe Hachette Bolloré. Ça fait un bien fou de chasser les miasmes, d’ouvrir grand la fenêtre.
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