J’imaginais le pouvoir autoritaire, surveiller et punir, un pouvoir de contrôle des populations, j’imaginais un pouvoir tyrannique par la contrainte des lois, la propagande, la fausse parole, j’imaginais un pouvoir trompeusement démocratique où les résultats des élections ne sont qu’un écran derrière lequel les mêmes ficelles sont tirées par les mêmes acteurs, à leur profit. Mais un pouvoir qui raille, je ne l’avais pas imaginé, un pouvoir qui se rit de nous, est-ce la première fois ? Le rire, c’était l’arme des faibles, des opprimés. J’avais lu d’Albert Cossery La Violence et la dérision, abattre le tyran par la moquerie, dégonfler son importance avec le ridicule, la résistance par le sarcasme. Mais nous ne rions plus, le rire nous a abandonné, il a changé de camp. Il est aujourd’hui du côté du pouvoir : j’entends rire le président et ses acolytes. Ce n’est pas qu’ils nous fassent une blague dont nous pourrions rire en commun, de complicité aucune sinon celle d’avec les lâches, la complicité des longs couteaux. Non, je les entends rire comme certains se moquent de celui qui trébuche, du naïf, des illusions enfantines, rire comme les voyous qui ont jeté leur victime à terre et le rouent de coups. Le rire de Macron et de Marine Le Pen, le rire de Barnier qui, du haut de son piédestal, jette un oeil sur le peuple grouillant des gens d’en bas.

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