Nous habitons une ville en perpétuels travaux, une zone de densification urbaine rapide, implacable, un cas d’école du basculement d’une commune populaire dans le grand remplacement bourgeois. Le fils déçu, hier: les copaines qui occupaient une friche en ont été chassées par la police. Les deux immeubles seront construits, les apparts vendus cher, l’opération immobilière rondement menée. Plus aucun squat ne tient à Montreuil, depuis déjà des années, et encore moins une occupation politique. Nous sommes quelques unEs au rassemblement le soir. Des prises de parole, l’une sur la lutte contre le projet du tronçon d’autoroute A69, qui continue malgré les blessés. Le militant qui a chuté de 8 mètres pendant l’opération militaire sur la ZAD restera invalide, m’apprend le fils. Ça me glace le sang. Nos fils sont handicapés à vie, tués, parce qu’ils agissent contre l’écocide général que les tartuffes au pouvoir ne font qu’aggraver pour la gloire du néolibéralisme vainqueur. Pendant les luttes pour tenter de sauver de la dévoration capitaliste, cet arbre, ce bout de marécage, cet arpent de prairie, ces salamandres qu’on ne verra bientôt plus qu’entre quatre vitres au zoo, l’attention du public français est orientée vers le défilé des bouffons allant au palais mendier une place de premier ministre. Pénible spectacle que cette cohorte de gueules de fin du monde. Que leur orgueil les étouffe.

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