Étrange moment, hier, quand voulant nous sortir des classiques et du bachotage, je fais lire aux élèves deux poète et poétesse contemporaines, leur réaction de rejet. Iels ne reconnaissaient plus ce qu’on leur a toujours présenté comme étant poésie, je m’en prenais à ce qui fait la stabilité de leur univers, la culture scolaire. Le monde et la langue d’aujourd’hui entrant en poésie, c’est marcher avec des semelles pleines de boue sur le tapis raffiné du salon. Au moins aurons-nous eu quelques minutes de discussion libre et vraie sur ce qu’est poésie, quelques minutes de vie dans le ronronnement de cette préparation à la rentrée, de ces prolégomènes à l’année d’examen et de sélection qui se profile tel un chemin malaisé au bord du gouffre, y compris pour elleux , les privilégiéEs. Puis l’écriture est venue, les unEs et les autres se découvrant, scandaleusement, un peu poètes. Le conformisme bourgeois tue la curiosité et l’invention, ce n’est pas nouveau. Il fut un temps où quelques professeurEs avaient la possibilité d’entrouvrir la fenêtre, de faire entrer un coulis d’air oxygéné dans les jeunes esprits, mais, comme disent ces derniers, ça c’était avant. Retour au rabâchage académique et à Rimbaud, certes, mais crevé, éviscéré, vidé de toute chair par la moulinette de la rhétorique. Nos grands poètes neutralisés.
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