Nouveauté de l’insomnie: écrire dans ma tête des chapitres entiers du texte en cours, entre trois et six heures du matin. Je peux dire que ça avance, tant les chapitres s’écrivent directement dans la tête beaucoup plus rapidement que sur l’écran, par la médiation du clavier. C’est fatigant, mais je n’en suis pas mécontente parce que le texte prend corps, il commence à exister par lui-même quand il me colonise entièrement jusqu’à envahir mes nuits sans sommeil. Mieux toujours que de m’angoisser sur le manque de boulot à rémunération et les factures qui s’abattent avec la régularité de la feuille frappant le billot du boucher. Mieux aussi que de remâcher l’impuissance face à tout ce qui se produit, avec quoi je ne suis pas d’accord, qui m’horrifie, m’encolère, m’attriste sans que ces sentiments négatifs ne mènent à quoi que ce soit pouvant changer les choses. Le monde est entre les mains d’une poignée d’hommes guidés par leur folie. Et c’est le plus souvent par les urnes qu’ils accèdent au pouvoir d’anéantir l’humanité. Cette nuit, trois femmes se parlaient, assises sur un banc devant l’océan, et l’inutile fureur des vagues se déchirait sur les brises-lames en contrebas avec un bruit tel que, pour s’entendre, les femmes devaient crier.

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Thème : Overlay par Kaira.