Le temps, dans cette première moitié d’août où le quartier se vide, se fige, prend une consistance cotonneuse mais dense pesant sur ceux et celles qui restent quand les autres sont partiEs. On est pris dans une immobilité concrète, et seuls les jours qui raccourcissent sensiblement indiquent que du temps s’écoule effectivement. Les fleurs aussi, qui s’épanouissent puis fanent. On est dans l’attente que les bruits quotidiens reviennent, la rumeur de la vie des autres fait partie de la nôtre et manque quand elle s’efface. J’écris le matin, lis l’après-midi et regarde l’herbe pousser dans la bande de terre où j’ai semé du gazon. Je vis dans une parenthèse de temps suspendu, en marge. Les mois qui viennent devront être ceux d’une reconversion professionnelle, je ne peux pas gagner ma vie en écrivant, encore moins subvenir à celles des enfants qui ne sont plus des enfants mais pas encore autonomes et, si je l’espère, je ne suis pas sûre que l’aîné puisse le devenir jamais. Très malheureux l’autre soir, il me téléphone. Dans la conversation me demande pourquoi je suis devenue prof. C’est simple, j’étais enceinte de lui, je devais gagner notre vie, j’ai passé le concours pour nous mettre à l’abri. Ce type d’explication le déstabilise, il semble croire que les personnes n’agissent que par nécessité intérieure, cette croyance lui occasionne de multiples malentendus.
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