Avant, les jours de manif, on savait qu’on rentrerait plus ou moins satisfaites de la journée, plus ou moins exaltées par la mobilisation, plus ou moins fatiguées, mais on savait qu’on rentrerait. Les manifestations qui se soldaient par des mortEs se passaient dans d’autres pays, en Guinée, en Biélorussie, dans des villes d’Amérique Latine ou d’Asie, ailleurs. On savait que dans le passé, par exemple à Fourmies en 1891, la troupe tirait sur les manifestantEs, faisant des mortEs et des blesséEs. Se faire tuer dans une manif, c’était du passé, c’était ailleurs. On vivait une époque relativement pacifiée, même si on n’oubliait pas Malik Oussekine. Et puis, il y a eu la mort de Rémi Fraisse, il y a eu les mortEs et blesséEs des Gilets Jaunes, il y a eu, dimanche, l’invraisemblable répression policière de la manifestation contre les mégabassines, deux cents blesséEs dont un homme gravement touché à la tête par une grenade explosive. Aujourd’hui, c’est jour de manif, la dixième de cette mobilisation contre la casse des retraites, plus largement contre ce monde dont nous ne voulons pas et que représentent le président de la république et son gouvernement. Aujourd’hui, je suis à l’arrière, c’est mon deuxième jour de résidence d’autrice à Royan. Je pense au fils qui va repartir en manif à Paris, malgré toute la violence policière qui ne le décourage pas mais renforce ses convictions qu’il faut en finir avec cette démocratie qui n’en est pas une, avec l’autoritarisme brutal de ce système moribond. La terreur, le pouvoir l’impose à la population. Le pouvoir terroriste fait qu’une mère, comme depuis toujours les mères des enfants raciséEs, a peur de ne pas voir son fils rentrer le soir à la maison parce qu’il va faire une chose aussi simple qu’un tour en ville ou participer à une manifestation. Ce pouvoir doit comprendre que nous ne céderons pas.

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