Les films de Rohmer que l’on peut revoir en ce moment sur arte, les Contes des quatre saisons, font apparaître en creux ce que le téléphone portable a bouleversé dans notre rapport aux autres. Nostalgie d’une vie sans écrans, alentie, comme un lieu d’enfance à jamais perdu. Regards portés sur ceux qui partagent le même espace au même moment, existences où l’on n’est pas disponible immédiatement pour les autres et réciproquement, où du flou, de l’incertain, du doute sont les éléments d’une journée ouverte sur l’imprévu, où il reste du temps pour la solitude et l’ennui, où subsiste la possibilité d’un dialogue. Bien sûr, il y a de l’incertain dans nos vies connectées, de la solitude et de l’ennui. Rien ne nous empêche d’éteindre nos objets techniques, au moins quelques heures. Mais ça n’est pas pareil. Le téléphone éteint reste dans la tête en tant que privation, on se retire du flux, on n’aura pas vu la vidéo que tout le monde aura vu, on ne recevra pas cette information importante à laquelle nous devrons aussitôt réagir que nous attendons plus ou moins consciemment. Vivre retiré du monde est sans doute un désir qui marque le passage à l’âge mûr, vivre retiré du monde de la communication permanente et immédiate, ma tentation actuelle. Restaurer le silence qui permet de réfléchir à ce qui nous arrive.
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