Dans ce roman que je traîne depuis des années sans avoir encore trouvé sa forme aboutie, que j’ai souvent pensé abandonner en y revenant toujours, il est question de militantEs. Mais cette histoire de militantEs et sympathisantEs engagéEs dans une lutte locale, je ne peux la séparer d’un portrait mouvant de la ville en transformation dans laquelle elle s’inscrit, ni des histoires personnelles des personnages qui s’engagent. Je me perds sur des chemins de traverse, abordant longuement des débats qui paraissent intenses à celleux qui sont dans l’action, mais n’intéressent pas autrement car ces querelles et réconciliations éventuelles qui absorbent tant d’énergie militante sont, finalement, superficielles, absurdes aux yeux de celleux qui ne sont pas impliquéEs. Je me heurte, je crois, au mur du point de vue. Il me faut adopter un point de vue alors que c’est précisément la multiplicité des points de vue, leur variabilité aussi, qui fait que ce collectif spontané et sans vraie organisation qui se constitue à l’occasion d’une lutte locale, est incapable de s’agréger suffisamment pour établir un rapport de force. Qu’est-ce que je peux faire avec cette bande de bras cassés plus ou moins bien intentionnés, sans leader ni héros, et dont toute la grandeur réside dans leur petitesse de gens ordinaires pris dans une situation viciée, et qui s’effiloche? Forcément, ça tourne en eau de boudin.
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