Paris n’est plus à Paris mais ne vit que dans les romans du siècle dernier. On y va encore, quelquefois, à la capitale. On y est traité comme les autres péquins, en touristes : on nous parle anglais. Je ne sais combien de temps les vacanciers venus de loin mettront à s’apercevoir qu’ils sont la seule population, mais de passage, que des habitants il y en n’a plus ou retranchés dans les derniers quartiers, ceux que les touristes évitent, qui attendent leur tour de nettoyage. Ils ne s’en apercevront pas puisqu’ils s’en fichent, sirotant leur bouteille de vin cher sur fond de tour Eiffel, servis par un garçon à l’accent français charmant, qui n’aura jamais les moyens d’habiter Paris. Pour la plupart, Paris se résume à un défilé de stations de métro ou de RER parcouru sous terre, dans un sens puis dans l’autre, aux deux bouts d’une journée de travail. De temps à autre la mairaisse organise en la ville lumière un événement culturel qu’elle affectionne, il lui faut alors mobiliser banlieusards et banlieusardes à grand renfort de communication, et les plus nostalgiques se rendent à la convocation, sans défraiement, jouer les figurantes d’un soir dans le vaste décor à la beauté désuète : on leur a prévu des trains de retour toute la nuit.

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