Je décroche, littéralement. Ne parviens plus à m’intéresser à ce qui agite l’actualité ici, les détails d’une querelle ou d’une autre. Non pas que je les méprise toutes, certaines sont du bruit ou des provocations mais d’autres touchent des sujets importants. J’ai l’impression de passer à côté de l’histoire. Vendredi encore un bateau a coulé, des hommes, des femmes, des enfants qui fuyaient leurs pays se sont noyés en Méditerranée. Ce matin on déclare l’extrême droite au pouvoir en Italie, et par les urnes. La guerre en Ukraine, les menaces de plus en plus lourdes d’utilisation par la Russie de l’arme nucléaire. Difficile de se réjouir tranquillement de ce qui se passe en Iran quand la liste des tuéEs sous le feu du pouvoir s’allonge, on donne les noms des jeunes révoltéEs qui meurent à vingt ans. Et moi qui ai l’âge de leurs parents : réduction à l’impuissance. J’admire celleux qui ne lâchent pas. Marie Cosnay, inlassablement, avec les étrangers et des étrangères près de la frontière franco-espagnole. Elle dénonce, inlassablement, les responsabilités des gouvernements, des élus locaux, de la police, dans ce crime que celleux qui sont au pouvoir organisent sciemment et que nous laissons faire. Je ne sais comment Marie tient, physiquement, psychiquement surtout. Elle ne décroche pas. Je pense à elle tous les jours. Et je m’en vais cultiver mon jardin, émerveillée de tenir dans le creux de ma main trois framboises mûres.
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